Le film nous révélerait un énorme scoop: selon un document de l’OMS, les tests PCR auraient dus être réservés aux patients malades, présentant des symptômes. Voyons de plus près… 

La séquence complète consacrée aux tests PCR dure un peu plus de 4 minutes (de 27:56 à 32:11). Il y aurait beaucoup de choses à redire, mais nous allons nous centrer ici sur cette «publication cruciale» de l’OMS :

Mettons-nous dans la peau d’un spectateur visionnant ce film dans un contexte «normal», tel qu’une projection dans une salle de cinéma, un spectateur invité à «se faire son propre avis», à «penser par lui-même». Nous entendons :

«Plus tard je lis sur le site officiel de l’OMS que les tests PCR peuvent produire de nombreux résultats erronés lorsque le taux de positivité décroît, ce qui est le cas en fin de phase épidémique.

Le testing de masse devient alors peu fiable.

Le test PCR devrait être réservé au patient qui présente des symptômes cliniques (c’est à dire s’il est malade).

Cette publication est cruciale parce que le testing de toute la population même asymptomatique est le socle sur laquelle repose la plus part des mesures de santé publique, du port du masque aux quarantaines.

Si le socle n’est pas robuste c’est tout le château de cartes qui s’effondre.

Les médias ont évoqué ce problème, sans pour autant renoncer au décompte quotidien des nouveaux cas qui continuer d’alimenter les gros titres.

L’annonce quotidienne du nombre de nouvelles contaminations par les autorités, reprises par les médias, constitue au minimum un glissement sémantique et au pire un mensonge d’État.»

Reprenons ce que nous voyons dans ce document « crucial ». D’abord ceci:

Puis ceci:

Si nous traduisons cet extrait de texte, nous obtenons :

«Objectif de cet avis : S’assurer que les utilisateurs de certaines technologies de tests d’acide nucléique (TAN) connaissent certains aspects des instructions d’utilisation (IFU) de tous les produits.

Description du problème : l’OMS a reçu des commentaires d’utilisateurs concernant un risque élevé de faux résultats pour le SRAS-CoV-2 lors de l’analyse d’échantillons utilisant des réactifs RT-PCR sur des systèmes ouverts.

Comme pour toute procédure de diagnostic, il est important de noter les valeurs prédictives positives et négatives du produit dans une population de test donnée. À mesure que le taux de positivité pour le SRAS-CoV-2 diminue, la valeur prédictive positive diminue également.

Cela signifie que la probabilité qu’une personne ayant un résultat positif (SARS-CoV-2 détecté) soit réellement infectée par le SARS-CoV-2 diminue à mesure que (…)»

Comparons le commentaire entendu à ce moment («Plus tard je lis sur le site officiel de l’OMS que les tests PCR peuvent produire de nombreux résultats erronés lorsque le taux de positivité décroît, ce qui est le cas en fin de phase épidémique. Le testing de masse devient alors peu fiable.») avec cet extrait de texte qui apparaît à l’écran. Il est difficile de différencier ce qui relève du contenu du document et ce qui relève l’interprétation, très, très libre, qu’en tire le réalisateur.

Allons plus loin et abordons maintenant ce qui est LE scoop révélé dans cette séquence. Et n’oublions pas notre petit exercice en cours : nous mettre dans la peau d’un spectateur visionnant ce film dans un contexte «normal», tel qu’une projection dans une salle de cinéma, et invité à «se faire son propre avis».

Reprenons donc juste ce tout petit extrait, de 8 secondes, où il est question de «publication cruciale».

«Le test PCR devrait être réservé au patient qui présente des symptômes cliniques (c’est à dire s’il est malade).»

«Cruciale»… Voilà un adjectif fort modeste. Pensons à toutes ces personnes qui, sans le moindre symptôme, ont subi ces fameux prélèvement nasopharyngés : cas contacts, voyageurs, etc. Et il ne s’agit pas d’une affaire belgo-belge mais bien d’une pratique mondiale.

Et pendant ce temps, un document de l’OMS aurait explicitement dit que ces tests devraient être réservés aux patients symptomatiques. Nous le croyons parce que nous l’avons sous les yeux. La preuve nous est montrée à l’écran : ce document, NOUS L’AVONS VU !

Mais qu’avons nous vu réellement ?

Ceci :

Un document, en anglais, qui défile rapidement. En spectateur lambda, dans sa salle de cinéma, nous n’avons bien sûr pas le temps de lire, même si notre oeil est particulièrement vif et que nous lisons l’anglais. Impossible d’ailleurs de décrypter ce texte, vu que l’extrait est coupé, toute la partie droite du texte est cachée. Tout juste peut-on entrevoir certains mots tels que «clinical», «patient», «epidemiological»…

Ce curieux découpage de l’image rend le texte incompréhensible, même pour celui qui regarderait ça tranquillement chez lui, sur son ordinateur, avec la possibilité d’appuyer sur «pause». Nous trouvons très curieux ce découpage maladroit qui enlève au spectateur toute chance de pouvoir lire ce texte, alors qu’il s’agit là d’une découverte de première importance, touchant à un scandale aux dimensions invraisemblables, révélé par un réalisateur expérimenté.

Un scoop majeur serait ainsi expédié en quelques secondes et le document, sensé servir de preuve, est un texte en anglais, qui défile rapidement à l’écran et dont on a tronqué la partie droite, au point de le rendre illisible.

Très, très curieux.

Allons donc consulter le document original, sans les découpages du réalisateur :

Nous traduisons :  «Évaluez tout résultat positif ou négatif en tenant compte du type d’échantillon, des observations cliniques, des antécédents du patient et des informations épidémiologiques.»

Le document dans son intégralité,  est archivé ici, nous en avons effectué une traduction complète (disponible en fin d’article) et là, oh, étonnement, pas la moindre trace du fameux scoop révélé par le réalisateur. À aucun moment l’OMS ne recommande de réserver les tests PCR aux patients symptomatiques.

Précisons que nous parlons ici de la version 1 de ce document daté du 7 décembre 2020 et mis en ligne à l’origine le 14 décembre. Depuis, le document a été mis à jour et c’est la version 2 que l’on trouve sur le site de l’OMS. Pour ce qui nous concerne ici, ça ne change pas grand-chose, si ce n’est que l’on peut en consulter la version française.

Car il y une version française, et ça met en évidence un détail qui n’est pas anodin : ce genre de documents, l’OMS les publie généralement en plusieurs langues, dont le français… Pour le document qui apparaît dans le film (la version 1), nous n’avons trouvé que la version en anglais (sur un site d’archives). Mais il y avait une version française (et dans d’autres langues) comme nous pouvons le constater sur le document officiel :

 

Cependant, si nous regardons l’image montrée dans le film, nous ne nous en rendons pas compte, en raison du découpage effectué par le réalisateur :

Le spectateur non averti, qui ne verrait que ce que le film montre, n’aurait à aucun moment la moindre raison de se demander «Tiens, pourquoi est-ce que le réalisateur nous met la version anglaise et pas la version française ?».

Aux sources du récit

«Mensonge»  d’État ou du réalisateur? Le mot est très fort. Accuserions-nous le réalisateur d’avoir fabriqué, de toutes pièces, un récit fictif ? Même pas…

L’hypothèse la plus probable est que le réalisateur s’est contenté de porter à l’écran un récit qui circulait déjà chez les adeptes de théories du complot, dans les réseaux sociaux et les blogs de réinformation. Voyons plutôt:

 Raelfrance ( La vie a été créée par des extra-terrestres appelés ELOHIM…)

This Is Sparta 

 

 

L’Oranaise (Patriote et fier de l’être)

Retrouver les sites complotistes et les explications factuelles nous amènent à citer une phrase du réalisateur :

«Je me suis nourri des textes et vidéos de nombreux journalistes indépendants, bloggeurs ou youtubeurs, parfois taxés de complotistes, qui ont effectué un travail remarquable et abondamment sourcé.»

Ben voyons…

«Se faire son propre avis» ? «Penser par soi-même» ?

La séquence sur les PCR avait déjà été analysé par des journalistes, comme dans cet article de l’Echo, ou cet autre article de la RTBF. Nous avions présenté l’intéressant travail réalisé par un post-doctorant adepte de débunkage et de vulgarisation sur sa chaîne, La Science te Parle ; lui aussi avait analysé les propos sur les PCR, comme nous pouvons le voir dans cet extrait.

Mais, journalistes professionnels ou débunker amateur, aucun n’avait eu l’idée d’aller comparer le propos du film au document original de l’OMS. Il ne s’agit nullement d’une critique. Notons seulement que même des personnes ayant examiné ce film très attentivement, n’ont pas vu la tromperie autour de cette publication présentée comme «cruciale». Nous-mêmes, cette vérification nous ne l’avons faite que suite à un échange sur les réseaux sociaux avec un blogueur et vulgarisateur, Alexander Samuel, qui a eu l’idée de comparer les affirmations du réalisateur avec le contenu réel du document de l’OMS.

Revenons à notre hypothèse de départ. Nous sommes le citoyen lambda assis dans une salle de cinéma, invité à «se faire son propre avis», à «penser par lui-même». Avons nous la possibilité de nous arrêter à chaque scène et de procéder aux vérifications que nous décrites ci-dessus ?

C’est bien sûr impossible. Et ici, comme dans les autres extraits analysés précédemment, seules foi aveugle ou crédulité sont sollicitées.

Grompf


Annexe

Traduction de la notice – WHO-identifier: 2020/5, version 1 – Date: 7 December 2020 

Notice d’information de l’OMS pour les utilisateurs de DIV

Technologies de tests d’acide nucléique (TAN) qui utilisent la réaction en chaîne par polymérase en temps réel (RT-PCR) pour la détection du SARS-CoV-2

 

Type de produit : Technologies de tests d’acide nucléique (TAN) utilisant la réaction en chaîne par polymérase en temps réel (RT-PCR) pour la détection du SRAS-CoV-2.

Date : 7 décembre 2020

Identifiant de l’OMS : 2020/5, version 1

Objet du présent avis : S’assurer que les utilisateurs de certaines technologies de tests d’acide nucléique (TAN) connaissent certains aspects des instructions d’utilisation (IFU) de tous les produits.

Description du problème : l’OMS a reçu des commentaires d’utilisateurs concernant un risque élevé de faux résultats pour le SRAS-CoV-2 lors de l’analyse d’échantillons utilisant des réactifs RT-PCR sur des systèmes ouverts.

Comme pour toute procédure de diagnostic, il est important de noter les valeurs prédictives positives et négatives du produit dans une population de test donnée. À mesure que le taux de positivité pour le SRAS-CoV-2 diminue, la valeur prédictive positive diminue également. Cela signifie que la probabilité qu’une personne ayant un résultat positif (SARS-CoV-2 détecté) soit réellement infectée par le SARS-CoV-2 diminue à mesure que le taux de positivité diminue, indépendamment de la spécificité du test. Par conséquent, les prestataires de soins de santé sont encouragés à prendre en considération les résultats des tests ainsi que les signes et symptômes cliniques, le statut confirmé de tout contact, etc.

Les utilisateurs de réactifs de RT-PCR doivent lire attentivement la notice d’utilisation afin de déterminer s’il est nécessaire d’ajuster manuellement le seuil de positivité de la PCR pour tenir compte de tout bruit de fond qui pourrait conduire à interpréter comme un résultat positif un échantillon présentant une valeur de seuil de cycle (Ct) élevée. Le principe de conception de la RT-PCR signifie que pour les patients présentant des niveaux élevés de virus circulant (charge virale), relativement peu de cycles seront nécessaires pour détecter le virus et la valeur Ct sera donc faible. À l’inverse, lorsque les échantillons renvoient une valeur Ct élevée, cela signifie que de nombreux cycles ont été nécessaires pour détecter le virus. Dans certaines circonstances, la distinction entre le bruit de fond et la présence réelle du virus cible est difficile à établir. Ainsi, la notice d’utilisation indiquera comment interpréter les échantillons à la limite ou proches de la limite de positivité de la PCR. Dans certains cas, la notice d’utilisation indiquera que le seuil doit être ajusté manuellement afin de s’assurer que les échantillons présentant des valeurs Ct élevées ne sont pas incorrectement attribués au SARS-CoV-2 détecté en raison du bruit de fond.

Les fabricants revoient régulièrement la conception de leur produit, y compris l’étiquetage et l’IFU, en fonction des commentaires des clients. Dans les premières phases de la pandémie de COVID-19, les diagnostics in vitro (DIV) ont été rapidement développés, validés et vérifiés, puis déployés. Par conséquent, il n’est pas surprenant que les DIV doivent être améliorés en fonction des commentaires des utilisateurs après leur introduction à grande échelle. Les utilisateurs doivent vérifier la version de l’IFU avec chaque envoi qu’ils reçoivent pour voir si des modifications ont été apportées à l’IFU.

Conseils sur les mesures à prendre par les utilisateurs :

  • Veuillez lire attentivement la notice d’utilisation dans son intégralité.

  • Contactez votre représentant local si l’un des aspects de l’IFU n’est pas clair pour vous.

  • Vérifiez l’IFU pour chaque envoi entrant afin de détecter toute modification de l’IFU.

  • Considérez tout résultat positif (SARS-CoV-2 détecté) ou négatif (SARS-CoV-2 non détecté) en combinaison avec le type d’échantillon, les observations cliniques, les antécédents du patient et les informations épidémiologiques.

  • Fournir la valeur du Ct dans le rapport au prestataire de santé demandeur.

Transmission de cet avis d’information de l’OMS aux utilisateurs :

Veuillez diffuser cet avis à tous ceux qui doivent être informés au sein de votre organisation ou à toute organisation où le produit potentiellement affecté a été déployé et utilisé.